Un bûcher sous la neige de susan Fletcher


 
Auteur: Susan Fletcher
Édition: J'ai lu
L'histoire:Au cœur de l'Ecosse du XVIIe siècle, Corrag, jeune fille accusée de sorcellerie, attend le bûcher. Dans le clair-obscur d'une prison putride le Révérend Charles Leslie, venu d'Irlande, l'interroge sur les massacres dont elle a été témoin, persuadé qu'elle sait quelque chose d'essentiel. Au fil de leurs conversations, Corrag s'ouvre peu à peu et lui confie son histoire, une vie de proscrite, condamnée par l'ignorance des hommes à fuir et à souffrir du manque d'amour. Chaque soir, ce récit continue, Charles suit Corrag à travers les Highlands enneigés, sous les cascades où elle lave sa peau poussiéreuse des heures de chevauchée solitaire. Chaque soir, à travers ses lettres, il se rapproche de Corrag et découvre une jeune fille instruite, connaissant le pouvoir des plantes et leurs vertus, qui n'a d'autre péché que son innocence...
Ma note: 11/10






Malgré le synopsis, permettez moi de vous réintroduire le contexte. C'est l'histoire de Corrag, une jeune fille accusée de sorcellerie et promise au bucher. Elle est donc interrogée par Charles Leslie au sujet de Glencoe.
Elle lui propose de tout lui raconter, à la condition de commencer depuis le début, depuis le début de son histoire à elle, car elle sait qu'elle va mourir, elle sait que personne ne se souviendra d'elle et elle veut laisser une trace, un témoignage, que quelqu'un sache.

Au fur et à mesure des conversations, Corrag va anéantir tous les préjugés que le révérend pouvait avoir nourrit à son endroit. Il comprend que même si elle n'est pas "instruite" au sens ou l'entend la société, elle l'est de bien d'autres manières. C'est une femme jugée de par sa manière de vivre et d'exister, de par sa vision au combien réaliste de la nature, c'est à travers le récit de Corrag que cette nature devient un personnage à part entière.

Chaque mot à un sens, un son, une fragrance, chaque mot est la terminaison nerveuse d'une description bouleversante de poésie. Éprouver à travers les mots, c'est ce que peu d'auteurs parviennent à transmettre.

A l'instar de Patrick Süskind avec son roman "Le Parfum", Les mots deviennent.

Un bucher sous la neige est un kaléidoscope de paysages bruts et vivants. Lorsqu'on lit ce qu'il s'est passé dans cette vallée de Glencoe, là bas dans les Highlands, on voit, on ressent, on y est. C'est un livre qui fait littéralement voyager, espérer, rêver et qui vous brise le cœur par ce qu'il conte.

La fin du récit est inévitable, mais on ne refait pas l'histoire. Pour moi qui suis une passionnée de l'histoire des jacobites et plus particulièrement des clans écossais, c'était un véritable crève cœur de "vivre" le quotidien dans cette vallée pour voir le tout s'éteindre...
Mais c'est cette réalité, encore actuelle, de l'Écosse cherchant a exister par elle même qui m'a touchée, elle fut punie pour avoir tenter cela, pour avoir voulu clamer sa liberté, hurler "SAOR ALBA" dans la vallée.
Il y a un parallèle entre le personnage de Corrag qui recherche cette même liberté, à la différence qu'elle se doit de payer le prix pour l'avoir goûtée, enchainée à sa cellule, punie. 
Et le personnage de Corrag, généreux par nature, nous fait partager son expérience. Durant un petit moment, l'instant de la lecture, nous sommes libres.


« Cora m'avait dit que la beauté était dans les différences, dans ce qui ne plaisait pas à la plupart des gens ou qui leur faisait peur. »

« Que pouvait-elle espérer ? Rien du tout. Ma grand-mère, fidèle à Dieu toute sa vie, fut conduite hors de la ville au lac du supplice. Son mari essaya de la défendre. Il essaya, mais qui peut vaincre l'accusation "sorcière" ? Alors il resta là à pleurer pendant qu'on la déshabillait. Il cria "j'aime ma femme" quand elle n'eut plus que sa chemise sur elle, et elle répondit "j'aime mon mari, très fort". Puis on lui attacha les pouces aux gros orteils, si bien que son menton touchait ses genoux. Ensuite, on la jeta à l'eau. Elle surnagea par trois fois. La quatrième, elle s'engloutit et c'était fini.

Cora avait tout vu. Elle regardait du haut du pont avec ses yeux de sorcière.
Bien plus tard, elle me jurerait que "le diable n'existe pas, il y a seulement les coutumes diaboliques de l'homme. C'est l'homme", elle disait entre ses dents," qui fait tout le mal...Tout le mal !" Et je sais qu'elle voyait sa mère en disant ça, elle voyait sa mère disparaître dans l'eau.
Après, son père avait trouvé
une auberge et n'était jamais parti.
Quant à Cora, ils espéraient tous qu'elle se tournerait vers le Seigner et qu'il la sauverait. Ma mère ? Non. Elle avait cet éclair dans le coeur, je crois, et rien ne pouvait l'éteindre. Elle a fait semblant de prendre goût à l'église, a caché son feu sous des sourires. Elle se servait de la croix suspendue à son cou pour écraser les mouches et retirer les graines des pommes,ou d'autres gestes qui n'avaient rien à voir avec Dieu.
Elle a fui la ville dès qu'elle a été assez grande pour courir vite. A six ou sept ans, pas plus.
»

« Prudente, toute femme l'est par nature quand elle est un peu différente des autres. »

« Tout ce que j'aimais m'entourait, rivières, rochers. Les bêtes. Les bruits du vent. Et je leur en étais reconnaissante. J'étais reconnaissante, car parmi eux je pouvais guérir les blessures en moi, les pertes, le chagrin... Ce que mon âme avait de meurtri, je pouvais le soigner et le nourrir dans ma cabane, ou sur les hauteurs, et qui en fait autant?
De nos jours, qui prend le temps de soigner son âme ? »
 

Intérêts: La plume de l'auteur, la beauté des mots, L'esprit et la liberté de Corrag, l'histoire autour du massacre de Glencoe.
Regrets: Si seulement on pouvait réécrire l'histoire...

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